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Le Blog de Jonathan Fanara

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« Blue Ruin » : le sang, la rouille et la poussière

Publié par Jonathan Fanara sur 3 Décembre 2014, 11:33am

Catégories : #Cinéma

L'Amérique de Jeremy Saulnier ressemble à s'y méprendre à la guimbarde délabrée de Dwight Evans : minable, désarticulée, à la dérive. Vagabond crasseux au regard flottant, l’antihéros de Blue Ruin vit à la marge d’une société en lambeaux. D’expédients et de rancœur. Incapable de trouver un quelconque point d’ancrage, encore sous le coup d’un traumatisme inaltérable, il ne sortira de sa torpeur végétative qu’après une longue ouverture contemplative, presque hypnotique, au moment précis où les forces de l’ordre lui apprennent la libération récente du criminel qui a décimé sa famille vingt années plus tôt. S’ensuivra alors une double mutation, physique et mentale, à l’aube d’une vendetta sanguinaire contrariant avec minutie les désuètes usines à rêves hollywoodiennes.

 

Un conte âpre et désenchanté, finement charpenté, que ne renieraient ni Jeff Nichols, ni les frères Coen. Avec ses personnages compromis et ses déluges d’hémoglobine, Blue Ruin apparaît comme une plongée vertigineuse dans le ventre mou des États-Unis, au premier rang de tous les cortèges scélérats. Brillamment interprété par Macon Blair, le gauche et parfaitement inapte Dwight Evans sonne la charge avec une indifférence mâtinée de fatalisme, comme s’il honorait froidement les termes d’un contrat qu’il avait paraphé à contre-cœur. Terrain vague, parking, toilettes publiques, logement investi clandestinement : partout s’égosille une bestialité vengeresse, tout sauf méthodique, avec la perdition en service commandé. N’y cherchez surtout pas une once de morale : Jeremy Saulnier – financé par les internautes – s’en désintéresse obstinément, comme pour mieux cristalliser et esthétiser les souillures emphatiques de son temps.

 

 

Lire aussi :

« Control » : inside Ian Curtis

"Soleil vert" : en partance pour l’enfer

Le Plus : "Snake Eyes" / Le Moins : "Fury" (#54)

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